Affiche du film L'oeil du Monocle
Le commandant Dromard, alias Le Monocle, doit récupérer un trésor et des dossiers secrets nazis engloutis au large de la Corse à la fin de la seconde guerre mondiale avec l’aide de Schlumpf, l’unique survivant du commando allemand chargé de l’opération.
Mais les services secrets anglais et russe aimeraient aussi mettre la main sur le magot et se le partager, « en toute loyauté bien entendu », histoire de ne pas refroidir une guerre déjà bien froide.
Les Russes feront-ils danser le Kazatchok au commandant et à son fidèle tueur d’élite : l’imperturbable Poussin ? A moins que Dromard ne suive les conseils du Major Cyring : « Monsieur le français, tirez le premier… ».
Qu’ils se méfient tous ! L’homme – amateur de Rolls, de caviar et de jolies femmes – sait aussi cogiter du chapeau et pourrait prendre au mot les recommandations de l’agent de la perfide Albion.
Diantre, vous ne connaissez pas le commandant Dromard ?
Théobald pour les intimes !
Rappelez-vous, le temps d’une apparition, il saluait Fernand et Raoul à leur entrée à l’église à la fin des Tontons flingueurs.
Ca ne vous dit rien ?
Sa distinction, son allant, sa droiture ! Son monocle vissé à l’œil et son balai – invisible – glissé profond dans le fondement de son élégant costume crème !
Le temps de trois films (Le Monocle noir en 1961, L’œil du Monocle en 1962, Le Monocle rit Jaune en 1964), il fut le héros flegmatique de Georges Lautner. Une sorte de galop d’essai pour le cinéaste dans le domaine du polar pince sans rire qui allait ouvrir la voie aux Tontons flingueurs et surtout aux Barbouzes. Nombre de seconds rôles de cette seconde aventure se retrouveront au générique de ces deux films mémorables. Robert Dalban (et son air de ne jamais se laisser démonter), Henri Cogan (lutteur adepte du bourre-pif), Paul Mercey (et sa mine rondouillarde), Jean Luisi (et sa trogne patibulaire) pour le premier. Charles Millot et son petit accent de l’est (agent Russe ou Allemand selon les films) pour le second.
Quant à Maurice Biraud, après s’être rebiffé dans le film de Gilles Grangier, il nous refait le cave avec la même brillante exaspération.
Face à eux, Paul Meurisse, gandin ganté et chapeauté au regard matois, est Le Monocle et porte le film sur ses épaules dans un numéro d’une irrésistible drôlerie.
Il suffit de le voir tenter de séduire/soudoyer une charmante espionne italienne (la belle Gaia Germani) au sommet d’un phare ou danser un twist avec raideur et petit levé de jambe pour s’en convaincre.
Vous l’aurez compris, L’œil du Monocle est avant tout un film d’acteurs et de mots d’auteur. Jacques Robert nous offre d’ailleurs ici un joli florilège de répliques qui tuent dont voici un aperçu :
« Savez-vous seulement nager ?
– Mon cher, je sors de Saumur pas de Naval ! »
ou
« Et si vous preniez des asperges ?
– Non, un homme lancé sur le caviar ne peut revenir en arrière. Vous m’en donnerez une boîte.
– La boîte fait 500g monsieur !
– Ça ira pour commencer ! »
A défaut d’un scénario consistant, les bons mots crépitent sous le soleil de Bonifacio – « On n’a pas idée d’ouvrir le feu par une chaleur pareil ! » – et donnent envie de redécouvrir toute la série des Monocle et son chapelet de morts pour rire.
Une fantaisie qui vaut son pesant de « calcioum » et qu’il serait de bon ton de redécouvrir.
Allez, « Faîtes-moi confiance ! ».
Ce à quoi Dromard pourrait bien répondre d’un air cassant : « Je suis bien obligé ! ».

Photo de Paul Meurisse et Robert Dalban